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Projet Ice&Life : Une étude inédite des écosystèmes post-glaciaires

Dans les Alpes françaises, les glaciers ont perdu plus de 60% de leur surface depuis 1850. Mais que reste-t-il une fois que ces géants de glace fondent ? Le Conservatoire d’Espaces Naturels de Haute-Savoie (ASTERS), Mirova Foundation et le WWF France présentent aujourd’hui les résultats du projet pionnier Ice&Life sur l’évolution récente et future des glaciers et la formation d’écosystèmes dans les zones libérées des glaces. Grâce à ces nouvelles données scientifiques, ils alertent sur l’urgence à mettre en place des politiques publiques ambitieuses pour la protection des glaciers restants et des écosystèmes qui leur succèdent.

Un voyage inédit dans le futur des surfaces englacées

Reposant notamment sur un partenariat développé entre le Conservatoire des Espaces Naturels de Haute-Savoie, Mirova Foundation – le fonds de dotation de Mirova – et le WWF France, le projet Ice&Life est le fruit d’une collaboration entre de nombreux acteurs scientifiques et techniques. L’objectif ? Comprendre l’évolution des glaciers et des écosystèmes post-glaciaires pour mieux les protéger. 

À l’aide de nombreuses données récoltées depuis 2021, l’équipe scientifique du projet a publié cet été les premiers résultats dans la prestigieuse revue Nature. Une première, puisqu’aucune analyse détaillée n’existait auparavant sur l’évolution future des surfaces glaciaires et sur ses conséquences écologiques.

Grâce à des modélisations détaillées, l’équipe scientifique a pu montrer que : 

  • D’ici à 2100, en dehors des calottes antarctique et groenlandaise, la surface des glaciers sur Terre pourrait diminuer de 20 à 50 % en fonction des émissions de gaz à effet de serre.
  • Les espaces désenglacés devraient ainsi s’étendre de 149 000 ± 55 000 km2 (la surface du Népal) selon un scénario respectant les accords de Paris, à 339 000 ± 99 000 km2 (la surface de la Finlande) selon un scénario “business as usual”. 
  • Ces surfaces seront composées de zones terrestres (78 %), de dépressions sous-marines (14 %) et continentales (8 %), permettant respectivement le développement de grands écosystèmes terrestres (zones minérales, pelouses, landes, forêts, etc.), marins (fjords, lagons, littoraux) et d’eau douce (lacs, milieux humides, rivières). 
  • Les glaciers et les écosystèmes post-glaciaires jouent un rôle majeur dans l’atténuation (albédo, séquestration carbone) et dans l’adaptation face au changement climatique, pour garantir l’accès à l’eau douce dans de nombreuses régions, limiter l’élévation du niveau marin et enrayer le déclin de la biodiversité.

L’urgence à mettre en place des mesures de protection ambitieuses

L’apparition de ces nouvelles surfaces post-glaciaires pose aujourd’hui de nouvelles questions : que cela soit au niveau local, national ou international, comment protéger ces écosystèmes et la biodiversité qui en dépend ? Comment préserver l’eau douce stockée dans les glaciers et les écosystèmes qui leur succèdent ? 

Malgré leur importance, ces écosystèmes sont encore peu reconnus dans les politiques de protection de la nature. Moins de 50 % des surfaces glaciaires sont situées dans des aires protégées. Le WWF France et les partenaires du projet Ice&Life demandent une meilleure protection des glaciers et des écosystèmes qui leur succèdent à travers : 

  • L’accélération de l’atténuation du changement climatique et l’application des engagements nationaux.
  • L’augmentation de la protection in situ de ces écosystèmes via la création d’aires protégées, la reconnaissance d’écosystèmes protégés (zones humides récemment apparues) et l’élargissement de la législation environnementale.

Ces propositions s’inscrivent dans une opportunité qui se dessine au niveau international, puisque l’année 2025 a été proclamée par l’ONU “année internationale de la préservation des glaciers”, avec la tenue d’un congrès mondial. 

Anne-Claire Roux Directrice générale de Mirova Foundation

Avec Mirova Foundation, nous soutenons Jean-Baptiste Bosson et l’équipe du Conservatoire d’Espaces Naturels de Haute-Savoie (ASTERS) depuis les débuts de Ice&Life. A travers un partenariat ambitieux entre acteurs académiques, associatifs, publics et privés, ce projet démontre l’importance des démarches collectives pour documenter et mettre en lumière les défis liés au changement climatique. Les travaux scientifiques menés par l’équipe d’Ice and Life et leurs recommandations dressent un constat inédit et sans appel : il est urgent d’agir pour préserver les glaciers restants mais également les nouveaux écosystèmes post-glaciaires qui commencent à apparaître.

Jean-Christophe Poupet Responsable du Programme Alpes au WWF France

Nous sommes heureux aujourd’hui de présenter les résultats novateurs et les prochaines étapes du projet Ice&Life. Ce projet est essentiel car il répond à de nombreux enjeux actuels : l’atténuation et l’adaptation face au changement climatique, la protection de la biodiversité et la gestion de l’eau douce. L’eau douce est aujourd’hui devenue une ressource précieuse et la disponibilité de celle-ci, rendue disponible par la fonte des glaciers, doit être encadrée. Il est donc urgent de mettre en place des mesures de protection ambitieuses pour les glaciers restants et pour ces nouveaux écosystèmes post-glaciaires.

Jean-Baptiste Bosson Coordinateur du projet Ice&Life, Glaciologue au Conservatoire d’Espaces Naturels de Haute-Savoie (Asters)

En développant Ice&Life aux côtés d’acteurs académiques, de la protection de la nature, de la société civile et demain de partenaires publics, nous sommes fiers d’innover et de mettre la connaissance scientifique au service des débats et des actions pour la transition dans les territoires. Mieux connaître, aimer, respecter et protéger la nature est la seule voie durable possible pour l’Humanité. Dans ce contexte, protéger les glaciers et les écosystèmes qui leur succèdent est une action à la fois primordiale, urgente et à haute valeur symbolique